L’histoire de l’évaluation des postes

23 avril 2021 6 min de lecture

Historique de l’évaluation

La loi du congrès américain de 1853 introduisant le principe « à travail égal, salaire égal » a posé la question de la comparaison des postes, des classifications et de l’analyse du travail et a inspiré de nombreux travaux de recherche.

Durant les années 1920-1930, les premières approches analytiques de la classification ont été développées aux Etats-Unis.

C’est lors des années 1940-1960 qu’a été conceptualisé le principe de « finalité », qui valorise moins le processus du travail que la contribution attendue du poste dans l’organisation. C’est à cette époque que seront consolidés les fondements de la méthode Hay. Outre le principe de finalité (« accountability »), la méthode Hay introduit l’échelle de point géométrique fondée sur la loi psychophysique dite de Weber-Fechner qui aboutira au « pas Hay » de 15%, d’une part, et la notion de « profil » définissant une condition d’équilibre entre les critères selon la finalité opérationnelle du poste, d’autre part.

Dans les années 1980-1990, plusieurs approches alternatives plus ou moins inspirées de la méthode Hay ont vu le jour. On citera la méthodologie IPE du cabinet Mercer qui donne un poids prépondérant à l’impact économique du poste renforçant, de fait, le concept de la finalité du poste ; l’approche du cabinet Hewitt qui met l’accent sur l’influence du titulaire sur la fonction évaluée in vivo ; ou la méthodologie du cabinet Altedia (méthode LDA) qui, par des analyses de corrélations sur des bases de données d’évaluations Hay, a construit une approche critèrielle empirique et additive ayant comme objectif principal de simplifier le processus d’évaluation.

L’opposition entre les approches individuelles et les approches organisationnelles

A cette époque, deux visions s’opposent. Les tenants de la vision organisationnelle souhaitent dissocier l’évaluation du poste et celle de son titulaire (Hay, Mercer ou dans une moindre mesure Hewitt). A contrario, les partisans de la vision individuelle considèrent que « c’est le titulaire qui fait le poste » et souhaitent construire des classifications sur la base des compétences du titulaire.

Durant les années 2000, l’évaluation de poste a été fortement remise en cause pour sa complexité et la rigidité qu’elle entraînait au sein des organisations. Le « broad banding », c’est-à-dire la classification des postes sur des bandes de gestions larges, est alors apparue comme l’alternative permettant de marier les deux approches. Les postes, dépouillés de toutes leurs spécificités, sont devenus « postes repères » et classés dans des bandes de gestion à large spectre. Les compétences individuelles des titulaires servant de référence pour affiner les positionnements au sein de chaque bande.

Pour autant, cette dernière approche a fait long feu car le positionnement des postes sur des bandes larges revenait, dans les faits, à une absence de classification, puisque la grande majorité des postes d’une organisation se trouvait regroupée sur trois ou quatre niveaux différents. D’autre part, les spécialistes de la gestion des compétences ont rejeté la vision trop restrictive qui était faite des compétences individuelles cantonnées à celles observées et mises en œuvre au détriment du développement individuel et du potentiel.

Depuis plusieurs années, on observe une trêve dans cette guerre des chapelles et l’approche organisationnelle d’évaluation des postes cohabite plus sereinement avec l’approche individuelle de la gestion des compétences.

Mais si les travaux et la maturité des Directions des Ressources Humaines ont continué à progresser sur les sujets de gestion des compétences et de développement individuel, la vision organisationnelle de l’évaluation de poste et de l’analyse critèrielle n’a guère progressé conceptuellement.

On a observé deux typologies d’orientation :

  • Soit une dérive progressive vers l’approche américaine de « job architecture », orientée sur le positionnement des postes au sein de bandes de gestion sans analyse approfondie de la structure des responsabilités et de sa déclinaison au sein de l’organisation. Approche très statutaire motivée par l’harmonisation des titres de postes et au sein de laquelle l’individu se distingue par sa performance (GGS de Willis Towers Watson).
  • Soit une orthodoxie attachée aux concepts fondateurs de l’analyse critèrielle (Korn Ferry Hay Group), portée par une croyance sans faille en leur universalité. Mais celle-ci, déjà mise à mal par l’émergence des organisations matricielles, l’est encore davantage par les mutations du travail, le lean management, l’approche agile ou l’entreprise libérée.

Les méthodologies d’analyse critèrielles sont confrontées à deux obstacles majeurs.

Le premier résulte de l’incapacité de mesurer la contribution économique d’un poste par une approche acceptable par tous. En effet, la transversalité fonctionnelle croissante, la réflexion continue de chaque filière professionnelle à sa propre valeur ajoutée ont rendu impossible l’évaluation atomisée de la finalité entre les postes d’une organisation. Il en résulte que le critère d’évaluation associé au périmètre économique sous responsabilité, pilier des méthodes finalistes, n’a plus de pertinence.

Le second est la projection de visions prédéfinies des facteurs de complexité de l’environnement d’un poste par le biais d’échelles descriptives comme l’effectif sous responsabilité, la dimension du périmètre international ou le positionnement hiérarchique. Ces visions modélisées ont simplement vieilli et il est indubitable de constater que les facteurs constitutifs de la complexité ont non seulement évolué en 40 ans, mais sont de plus en plus propres à chaque entreprise.

Une nécessaire évolution

L’approche CLARITY d’analyse des postes, développée par les équipes du Conseil RH de Diot Saici, s’inscrit dans la lignée des méthodologies critèrielles d’évaluation mais entend apporter une réponse aux limites suscitées.

La méthodologie ne reprend pas le concept de finalité et n’intègre pas de critère associé au périmètre économique. L’évaluation de la complexité de l’environnement intègre la perception opérationnelle et les enjeux internes de l’organisation sans modèles pré-pensés. Enfin, la contribution individuelle du titulaire, dès lors qu’elle répond à une exigence du poste, est prise en compte au travers du concept de densité des compétences.

Si l’approche organisationnelle de l’évaluation de postes et l’approche individuelle de gestion des compétences se sont opposées dans un premier temps pour désormais cohabiter, nous sommes convaincus que les entreprises et les acteurs de la fonction ressources humaines attendent qu’elles collaborent et s’enrichissent mutuellement.

C’est dans cet esprit que l’approche CLARITY trouve son sens et repositionne l’évaluation de poste et l’analyse des organisations sans compromis de rigueur et avec l’ambition d’accompagner nos clients

L'auteur

  • Denis LESIGNE

    Directeur Offre Rémunération & Talents, Groupe Diot-Siaci

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